Colère libératrice
Par Solveig, samedi 3 juin 2006 à 04:42 :: General :: permalien #280
C'était la première fois qu'une fin de relation me détruisait. Je n'avais jamais connu de ces ruptures haineuses où l'on déteste l'ex-amant. Je n'avais jamais connu ces masses de rancoeurs, ces antagonismes larvés, qui maturent dans le non-dit, s'aigrissent et explosent à la gueule avec la relation. Ce n'était pourtant pas la première fois que j'aimais, mais jusque-là, la rupture ne salissait pas ce que j'avais pu vivre de beau avec ceux que j'avais aimés.
Ma relation avec L. a été la plus longue que j'aie vécue - trois ans et demi ; il y a un an, elle se terminait. Je ne pensais pas que nous puissions être si important l'un pour l'autre et, soudain, devenir pire qu'étrangers... le sentir hostile. Ne pas comprendre son attitude, en être tourmentée pendant des mois, et me culpabiliser.
Puisque notre relation amoureuse était finie, il ne gérait plus du tout nos interactions, ne tenait absolument plus compte de mes ressentis - appuyant sur mes faiblesses qu'il connaissait si bien, sinon dans l'intention de faire mal, du moins sans scrupules à le faire. Mais s'il n'en avait rien eu à faire de moi, il ne lui aurait pas été égal de me faire souffrir. J'ai cru qu'il était en colère, mais lorsque je tentais d'en parler avec lui, il assurait que pour lui, la page était tournée et qu'il n'avait plus de problème avec moi. Et d'ailleurs je tentais en vain d'établir un dialogue, il n'avait plus rien à me dire, ni même envie de me parler.
Peu à peu sa condescendance, ses sévères jugements sur moi et l'irritation qu'il manifestait devant chaque signe de mon existence se rejoignaient pour indiquer que, pressé de se débarrasser de sentiments encombrants, il m'avait décrétée indigne d'eux et s'en était effectivement vite libéré. Puisque j'étais une conne, la fin de notre relation ne pouvait le faire souffrir. Le mépris le libérait de moi, de sa douleur, et des remises en cause aussi, sans doute.
Un soir, j'ai été envahie d'une immense colère contre lui, contre cette irresponsabilité affective, contre l'attitude de connard qu'il avait adoptée, dont je n'aurais pu soupçonner qu'il fût capable. Je ne dis pas que ce n'est qu'un connard - c'est quelqu'un de merveilleux par plein d'aspects, avec qui j'ai eu une relation enrichissante, et si j'ai souffert, c'est de l'avoir supposé capable de gérer la douleur de la rupture, alors qu'il ne l'était pas. Si j'ai souffert, c'est parce que j'avais l'habitude de faire le bilan de mes relations avec les intéressés, d'en faire le deuil sans la pourrir, sans regretter ce que nous avons vécu - cela prend parfois du temps, surtout lorsqu'on a partagé un amour passionné, mais cela permet de construire des relations fortes sur la base de notre complicité, connaissance réciproque, affection.
Le lendemain matin, j'étais libérée de cette douleur : mon deuil, je le ferais toute seule, et s'il était prêt, s'il avait envie un jour de faire ce bilan, de s'investir dans une relation amicale ou du moins cordiale, tant mieux. Mais je pouvais aussi bien attendre des années, et j'allais pas souffrir pendant ce temps.
Je suis encore triste que cela se soit fini comme ça. Mais cette tristesse ne me ronge plus ; parfois j'ai encore quelques bouffées de rage, mais je ne le croise plus très souvent alors ça ne m'empêche pas de vivre.
Commentaires
1. Le dimanche 4 juin 2006 à 15:16, par Lunar
2. Le dimanche 20 août 2006 à 02:47, par SoCreate
3. Le mercredi 8 novembre 2006 à 15:28, par unknown
4. Le samedi 11 novembre 2006 à 22:21, par Solveig
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