Grammaire féminisée
Par Solveig, jeudi 4 novembre 2004 à 01:47 :: General :: permalien #196
Explication en première page de toutes le bonnes brochures :
Par " féminiser " le langage, on entend bousculer cette bonne vieille grammaire, qui voudrait faire primer le masculin sur le féminin. Cet état de fait n’est pas anodin. Le langage est un reflet de notre société patriarcale : il entretient la domination d’un genre sur l’autre. Parce qu’il est notre premier mode d’expression, il a une fonction fondamentale, et peut être utilisé à bien des fins. S’il est structuré, le langage est également structurant : il conditionne notre pensée, la formate, il guide notre vision du monde. Remodeler le langage c’est refuser une domination, construire d’autres inconscients collectifs.
J'aime bien cette explication, mais je vais développer.
D'accord, la féminisation du français est étrange - puisque nouvelle. Cela signifie-t'elle qu'elle soit mauvaise ? Pas si sürE. La langue est un outil de communication, et comme tous les outils, elle nécessite d'être adaptée à l'usage qu'on veut en faire. Ainsi, le langage SMS pour des communications rapides n'est cependant pas adapté aux discussions philosophiques, ou les langues ultra-spécialisées hermétiques aux non-initiés (informatique comprise), permettent d'affiner les concepts/recherches dans un domaine mais pas d'expliquer un exo de maths à unE enfant.
CertainEs conservateurices voudraient figer le langage, et trouvent que toute modification est "laide", prétendent ne pas pouvoir lire un texte féminisé. Alors... un texte mal féminisé est difficilement lisible, de même qu'un texte mal orthographié, par contre lorsque c'est bien fait, le temps d'adaptation est très court.
Et surtout, il y a de bonnes raisons pour féminiser. La langue formate la pensée : on ne pense pas pareil en français, anglais, allemand (pour ne citer que les langues dans lesquelles il m'arrive de penser). La pensée arrive à la conscience sous forme de mots, et ces mots imposent leurs contraintes à la pensée. Or oui, il y a d'autres luttes importantes pour les femmes, il suffit de penser au harcèlement sexuel, aux différences de salaires, au manque de crèches ou au peu de femmes à des postes de pouvoir. Mais je ne pense pas que la langue soit accessoire : grandir dans un environnement qui les exclut des rôles "dominants" (docteur, professeur, auteur, chef...) et invisibilise leur présence dans des groupes mixtes est certainement une bonne façon d'inculquer aux femmes à se taire et rester derrière. La masculinisation a cet effet : si je vous dis "docteur" ou "procureur", votre représentation mentale sera un homme. Cela influe sur la façon dont on se construit...
Le français ne connait pas de neutre pour dépasser ce clivage masculin/féminin. Alors ce qui s'appelle féminisation de la langue est en fait une "universalisation". Ainsi, un masculin pluriel reste un masculin pluriel ("ils ont un pénis"), par contre un pluriel mixte arrête de nier la présence de femmes ("ils/elles viennent demain").
Comment féminiser ?
ChacunE utilisera la forme qui lui convient. Par contre, je conseille de choisir une forme et de s'y tenir à l'intérieur du texte.
- les pronoms :
- singulier (pour parler d'une personne de sexe indéfini) : ille, el
- pluriel (groupe mixte) : illes, els, ils/elles
- les noms :
ça dépend de la forme :
- terminaison en -eur, -euse donnera "amoureureuse" ou "amoureux/reuses"
- terminaison en -er, -ère donnera "postier/ère" ou simplement "postièrE"
- terminaison qui prend un -e : on le marque, ainsi "amiE", "ami(e)", "ami-e"...(si l'on se contente d'écrire "amie", c'est un féminin donc ça ne dégenre pas, m'enfin certainEs utilisent la féminisation systématique pour contrebalancer la masculinisation)
Ainsi de suite, et puis c'est un peu selon votre imagination et vos préférences. Après tout, la langue que vous utilisez est votre outil !
- les articles :
un/une, unE, un(e), un-e
le/la, lea, lae
- les accords :
- en français, la plupart des adjectifs prennent un -e au féminin, donc comme sur les noms ci-dessus : au choix, on rencontre "intelligentE", "intelligent(e)", "intelligent-e" - parfois, le féminin rajoute une/des lettre(s) : "francHE", "violetTE"...
- pour les adjectifs qui changent de forme, le plus courant est de mettre les deux : ainsi "beau/belle" (quoiqu'ici on pourrait mettre "belLE"), "courageux/euse"...
- certains adjectifs sont neutres : juste, étrange, féroce, humanitaire, égoïste, équivoque...
Plus tous les petits mots : quelqu'unE, certainEs, chacunE, touTEs,...
Maintenant, c'est de lire un texte qui m'exclut qui me gêne. Habituez vos yeux !
Sexisme et grammaires scolaires
Que nous apprend l'histoire de la langue ?
Commentaires
1. Le samedi 6 novembre 2004 à 11:13, par Le hasard
2. Le samedi 6 novembre 2004 à 14:13, par Eve
3. Le samedi 6 novembre 2004 à 14:50, par Le hasard
4. Le samedi 6 novembre 2004 à 15:53, par Eve
5. Le samedi 6 novembre 2004 à 16:32, par korafetish
6. Le samedi 6 novembre 2004 à 20:57, par Le hasard
7. Le lundi 8 novembre 2004 à 06:09, par kyi
8. Le lundi 8 novembre 2004 à 10:54, par Le hasard
9. Le jeudi 11 novembre 2004 à 04:10, par korafetish
10. Le jeudi 11 novembre 2004 à 12:24, par Le hasard
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